La sensation de plaisir immédiate, vous connaissez ? C’est précisément cette sensation que me procurait l’Alcool lors de la machiavélique première gorgée du premier verre… Un seul verre ne suffisait pas. Il fallait continuer à remplir ma carcasse vide, étranglée dans une flopée d’incompréhension. Je me précipitais au comptoir, dans les caves à vin, chez l’épicier, dans le frigo des amis… je jubilais jusqu’au bout du tunnel. Je me précipitais dans le précipice de l’oubli.
Je me buvais si bien dans ces lambris de bière, champagne, alcools sucrés, vins dégueulasses ou fruités à souhait. Seulement, aujourd’hui dans ma jeune abstinence, je constate que je n’ai pas avancé d’un pouce dans ma vie. J’ai grillé toutes les étapes. J’ignore ce que sont l’amour, les voyages, une situation financière et professionnelle douillettes, toutes ces choses que mes proches savourent depuis fort longtemps. J’enrage à l’idée de ne pouvoir avancer plus vite. J’enrage à l’idée de me tromper régulièrement. J’enrage de ne pas savoir vivre pleinement, même après avoir posé le verre. La patience s’avère être alors une vertu nécessaire pour continuer… aussi, je relis quelques promesses du Big Book pour me faire du bien et j’adresse une prière au créateur de l’univers, débordant d’amour à mon égard… c’est ce que racontent les amis du mouvement des Alcooliques Anonymes. Je les crois, je n’ai pas le choix, je suis contrainte de les croire si je veux ressusciter sous un jet de lumière…